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Un comité de l'ONU condamne la détention du fondateur de WikiLeaks

Arrêtez la persécution de Julian Assange!

Par Bill Van Auken
6 février 2016

Plus de cinq ans après une première détention en vertu d'un mandat d'arrêt européen émis par la Suède en rapport avec des allégations fabriquées d'inconduite sexuelle, et après plus de trois ans et demi passés dans l'ambassade équatorienne à Londres, le fondateur de WikiLeaks Julian Assange a été conforté par un comité des Nations unies sur la détention arbitraire. Cette instance a jugé que sa persécution par les gouvernements suédois et britannique revenait à de la « détention arbitraire » et constituait une violation du droit international.

Le seul «crime» d'Assange est qu’il a divulgué des documents secrets détaillant les crimes de guerre réels et meurtriers commis par le gouvernement américain en Irak et en Afghanistan, ainsi que les complots ourdis par le Département d'Etat américain et la CIA dans des pays du monde entier.

Parce qu’il a révélé ses opérations criminelles, Washington est déterminé à réduire Assange au silence et à le punir, utilisant les mensonges concoctés par les procureurs suédois et la complicité du gouvernement britannique pour arriver à ses fins.

Le ministère suédois des Affaires étrangères a pris acte jeudi de ce que le groupe de travail de l'ONU sur la détention arbitraire (UNWGAD) publierait ses conclusions vendredi, selon lesquelles Assange avait été « privé de sa liberté de manière arbitraire pour une durée inacceptable. »

Le comité onusien n'aurait pu parvenir à une telle décision que sur la base de preuves irréfutables que les accusations portées contre Assange constituaient un coup monté juridique ourdi à des fins politiques.

Même avant que les conclusions de ce comité ne soient connues, Assange avait publié un communiqué depuis l'ambassade équatorienne acceptant la décision comme le point culminant de son ultime recours juridique. Il a déclaré qu’au cas où le comité se prononcerait contre lui, il quitterait l'ambassade vendredi « pour accepter [son] arrestation par la police britannique ». Il a encore insisté pour dire que si le comité constatait que les gouvernements suédois et britannique agissaient en violation du droit international il « attend[ait] qu'on [lui] rende immédiatement [s]on passeport et qu'on cesse de tenter à nouveau de [l]e faire arrêter ».

Mais ni Londres ni Stockholm ne se sont montrés décidés à permettre que le droit international et les traités relatifs aux droits de l'homme, dont ils sont tous deux signataires, guident leurs actions.

Un porte-parole du premier ministre britannique David Cameron a déclaré cyniquement que Julian Assange n'avait « jamais été détenu arbitrairement par le Royaume-Uni mais qu’en fait, il évit[ait] volontairement une arrestation légale faisant le choix de rester à l'ambassade équatorienne. » La police britannique n’a levé son siège permanent de l'ambassade qu’en octobre dernier, annonçant qu'elle allait recourir à des méthodes « secrètes » pour capturer Assange. A un moment, le gouvernement britannique a indiqué qu'il ignorerait le droit international protégeant les ambassades et qu'il ferait prendre d’assaut le bâtiment par ses forces de sécurité.

Le ministère des Affaires étrangères suédois a lui, publié une brève note affirmant que la décision de l'ONU « différait de celle des autorités suédoises» et ne modifierait pas sa vendetta judiciaire contre le fondateur de WikiLeaks.

Les gouvernements britannique et américain ont régulièrement invoqué les conclusions du comité onusien sur les détentions arbitraires quand ils pouvaient les utiliser comme prétexte « humanitaire » de leurs opérations impérialistes contre des pays comme la Chine, la Russie, l'Iran, la Syrie, le Venezuela et Cuba. Mais Londres et Washington rejettent d’emblée que leurs actions elles, soient soumises au droit international.

Ce qu'ils trouvent inacceptable est la révélation de leurs crimes qui ont tué et blessé des millions de personnes et en ont transformé plusieurs millions en réfugiés. Voilà pourquoi ils ont non seulement traqué Assange mais encore incarcéré pour 35 ans le soldat Chelsea (anciennement Bradley) Manning.

Manning a été condamné par un tribunal militaire expéditif en 2013 sur des accusations d'« aide à l'ennemi » pour avoir fourni à WikiLeaks des centaines de milliers de documents classés, y compris la vidéo « Assassinat collatéral » montrant le massacre en 2007 de douze civils irakiens à partir d'un hélicoptère Apache. Ont aussi été fuités le «Journal de guerre afghan » et le « Journal de guerre irakien, » qui révélaient de nombreux crimes de guerre commis par l'armée américaine; et plus de 250.000 télégrammes diplomatiques secrets américains révélant les intrigues contre-révolutionnaires de Washington dans le monde entier.

Pendant ce temps, Edward Snowden, l'ex-consultant de la NSA (Agence nationale de sécurité) ayant exposé la collecte universelle par celle-ci de toutes les formes de données sur toute la planète, tant de citoyens américains que de citoyens étrangers, en violation flagrante du Bill of Rights américain et du Droit international, a été transformé en apatride et vit dans un exil forcé à Moscou.

Parmi d’autres cas similaires il y a celui de l'ex-agent de la CIA John Kiriakou, la seule personne sanctionnée en relation avec la torture de détenus par la CIA et incarcérée pour l'avoir dénoncée publiquement. Le gouvernement Obama a poursuivi plus de gens en vertu de la Loi sur l’espionnage pour divulgation d’informations secrètes aux médias que tous les autres présidents américains réunis.

Assange peut s'attendre à pire encore s'il tombe entre les mains de la police britannique et des autorités suédoises qui agissent en agents de l'appareil militaire et de renseignement américain. Il a fait l'objet d'une enquête secrète par un Grand jury pendant plus de cinq ans et il est sans aucun doute accusé, par acte d'accusation secret, d'espionnage et autres crimes contre l'État qui pourrait lui valoir la prison à vie ou même la peine de mort. Des personnalités politiques de premier plan des États-Unis ont déjà ouvertement appelé à son assassinat.

Assange, Manning, Snowden et d'autres ont été persécutés implacablement pour avoir osé révéler les opérations secrètes du gouvernement américain.

Cette chasse aux sorcières est motivée par les besoins les plus impérieux de l'Etat américain, qui fonctionne en instrument de l’oligarchie financière. Il défend la grande richesse et le monopole du pouvoir politique de cette couche dirigeante, contre la masse des travailleurs aux États-Unis et dans le monde ; il cherche aussi à compenser le déclin économique du capitalisme américain en menant des guerres d'agression de plus en plus dangereuses. Étant donné le caractère criminel de ces opérations, un régime du secret et des méthodes de plus en plus dictatoriales sont indispensables.

La seule base authentique pour une défense des droits démocratiques est la classe ouvrière. Les travailleurs doivent prendre la défense d'Assange, Snowden, Manning et des autres victimes des complots et de la répression de l'Etat.

Il faut s’opposer à toute tentative d'arrêter ou d'extrader Assange par des manifestations de masse et des actions sur les lieux de travail au Royaume-Uni, aux États-Unis et partout dans le monde.

Cette campagne pour la défense d'Assange et des autres victimes de la répression d'Etat ne peut avancer que dans le cadre d’une lutte de la classe ouvrière internationale contre le système capitaliste dont la crise historique menace l'humanité d’une guerre mondiale et de dictatures policières.

(Article paru en anglais le 5 février 2016)