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Le risque de guerre en Asie

Par Peter Symonds
28 avril 2014

Alors même que le spectre d'une guerre en Europe est agité par la confrontation provocatrice de Washington avec Moscou en Ukraine, le président Obama fait le tour des alliés américains en Asie en attisant des points chauds régionaux et en consolidant l’encerclement militaire américain de la Chine en préparation d’un conflit dans le Pacifique.

Le volet central du voyage d’Obama est sa visite d’Etat au Japon cette semaine où il a réaffirmé sa détermination « à renouveler la direction américaine en Asie-Pacifique. » La déclaration d’Obama visait à mettre fin aux suggestions que le « pivot vers l’Asie » des Etats-Unis, une offensive diplomatique et un renforcement militaire ayant pour but la subordination de la Chine, se trouvait au point mort.

Au cours de ces cinq dernières années, le « pivot » d’Obama a transformé la région Inde-Pacifique en une poudrière de rivalités géopolitiques et de tensions, encourageant des alliés tels que le Japon et les Philippines à poursuivre plus résolument avec la Chine leurs différends territoriaux dans les Mers de Chine orientale et du Sud. Lors d’une conférence de presse commune avec le premier ministre japonais, Shinzo Abe, Obama a encore mis de l’huile sur le feu en affirmant que « l’obligation [américaine] sur la sécurité du Japon est absolue », y compris en ce qui concerne les îles contestées de Senkaku/Diaoyu.

La volonté d’Obama de rejoindre le Japon dans une guerre contre la Chine à propos d’un petit relief rocheux inhabité situé en Mer de Chine orientale souligne l’irresponsabilité absolue de la politique étrangère américaine. Ce qui était une querelle peu connue il y a à peine cinq ans a été transformé en un dangereux point chaud en termes de conflit militaire. En clamant un soutien militaire « absolu » de Washington pour le Japon, Obama a donné le feu vert à Abe pour que celui-ci intensifie davantage le conflit avec la Chine.

En Ukraine, les Etats-Unis collaborent avec des organisations ouvertement fascistes. Au Japon, Obama fait équipe avec le gouvernement le plus droitier depuis la Seconde Guerre mondiale. En à peine plus d’un an, Abe a augmenté les dépenses militaire pour la première fois en dix ans, il cherche à mettre fin aux restrictions constitutionnelles imposées aux forces armées japonaises et il a mis en place un conseil de sécurité nationale de type américain. Il refuse même de reconnaître la revendication de la Chine sur les îles contestées.

Abe renoue délibérément avec les traditions tristement célèbres du militarisme japonais qui furent responsables d’atrocités comme celles du massacre de Nanjing en 1937 durant lequel les troupes impériales avaient massacré des centaines de milliers de civils et de soldats chinois. Sa visite en décembre dernier au tristement célèbre sanctuaire Yasukuni qui est consacré aux Japonais morts à la guerre et qui abrite 14 criminels de guerre de classe A a été le feu vert à une campagne de blanchiment des crimes de l’impérialisme japonais. Durant le même mois, Abe a nommé quatre figures de droite au conseil d’administration du groupe public de radio-télévision NHK, dont l’auteur Naoki Hyakuta qui avait déclaré en février que le viol de Nanjing n’avait « jamais eu lieu ».

Le gouvernement Obama est directement responsable de cette relance du militarisme japonais. La Maison Blanche a fait pression pour que le premier ministre Yukio Hatoyama démissionne en juin 2010 lorsque ses projets de nouer des liens plus étroits avec la Chine et de retirer les bases militaires américaines d’Okinawa étaient entrés en conflit avec les préparatifs du « pivot ». Au moment où la querelle à propos des îles Senkaku/Diaoyu éclatait, les Etats-Unis avaient attisé les tensions en proclamant publiquement soutenir le Japon en cas de guerre avec la Chine. Abe et son Parti libéral démocrate de droite avaient exploité le climat de guerre pour remporter les élections nationales de 2012.

Lors de la conférence de presse de cette semaine, Obama n’a pas tari d’éloges pour « l’engagement exceptionnel envers notre alliance, » d’Abe et donné son aval à la remilitarisation du Japon. Il a salué « notre coopération de sécurité renforcée » et « la progression réalisée dans l’alignement de nos forces dans la région, » en ajoutant que les forces américaines au Japon « incluront nos capacités militaires les plus avancées. »

Les provocations d’Obama en Ukraine à l’encontre de la Russie et son « pivot vers l’Asie » qui vise la Chine sont les deux fronts d’une stratégie plus large ayant pour but la subordination de la masse continentale eurasienne à l’impérialisme américain. En 1977, suite à l’effondrement de l’Union soviétique, l’ancien conseiller américain à la sécurité nationale, Zbigniew Brzezinski, avait souligné l’importance cruciale de l’Eurasie pour le maintien de l’hégémonie mondiale américaine. En écrivant dans le magazine Foreign Affairs, il avait déclaré: « L’Eurasie étant devenu maintenant l’échiquier géopolitique décisif, il ne suffit plus de modeler une politique pour l’Europe et une autre pour l’Asie. Ce qui se passe avec la répartition du pouvoir sur la masse continentale eurasienne sera d’une importance décisive à la primauté mondiale de l’Amérique et de l’héritage historique. »

Les principaux obstacles aux ambitions américaines en Eurasie sont la Chine et la Fédération russe et qui, en ce qui concerne Obama, ont d’ores et déjà contrecarré des projets américains au Moyen-Orient, notamment l’intervention en Syrie. Les intrigues américaines en Ukraine qui ont délibérément provoqué une confrontation avec la Russie, montrent qu’Obama est prêt à risquer une guerre avec un adversaire qui dispose de l’arme nucléaire. Obama avait déjà misé sur un conflit avec la Chine lorsqu’il avait ordonné en novembre dernier à deux bombardiers B-52 à capacité d’armement nucléaire de défier la déclaration de Beijing sur une zone de défense d’identification aérienne (ZDIA). L’objectif de Washington n’est pas juste de contenir la Russie et la Chine, mais de les assujettir entièrement aux intérêts de l’impérialisme américain, au besoin par leur démembrement et leur dissolution.

La classe ouvrière internationale est confrontée à de grands dangers. Cent ans après le déclenchement de la Première Guerre mondiale, le capitalisme est rongé par les mêmes contradictions fondamentales qui ont précipité par deux fois au 20ème siècle le monde dans dans la barbarie. La poussée vers une guerre de la part de l’impérialisme américain et de ses alliés va de pair avec une guerre de classe grandissante à l’encontre des droits démocratiques et sociaux de la classe ouvrière à l’intérieur du pays. La promotion du militarisme et de la guerre aux Etats-Unis, au Japon et en Europe est une tentative délibérée de détourner les immenses tensions sociales internes vers un ennemi extérieur.

Sans une lutte politique pour la mobilisation de la classe ouvrière internationale visant à abolir le système de profit dépassé, la dérive vers la guerre est inévitable. Le Comité international de la Quatrième Internationale et le World Socialist Web Site organiseront le 4 mai un rassemblement international sur internet pour célébrer le premier mai dans le but d’initier un mouvement antiguerre dans le monde entier. Nous encourageons instamment les travailleurs et les jeunes de chaque pays à se joindre à ce forum et ce débat communs sur la perspective socialiste révolutionnaire internationale qui doit animer cette lutte. Inscrivez-vous dès aujourd’hui à internationalmayday.org.

(Article original paru le 26 avril 2014)