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La tournée de Trump en Asie laisse la région au bord de la guerre commerciale et des conflits militaires

Par James Cogan
16 novembre 2017

La tournée de 12 jours en Asie du président Donald Trump a mis en évidence le fait que l’impérialisme américain – une puissance en déclin en proie à de multiples défis extérieurs et crises internes – est le facteur le plus instable et déstabilisateur de la politique mondiale. Trump a suscité encore plus d’inquiétude à propos des politiques de son gouvernement qu’il n’en existait avant le début de la tournée.

La question immédiate est de savoir si, ou quand, Trump mettra en pratique ses menaces de « détruire totalement » la Corée du Nord si le régime de Pyongyang ne capitule pas devant l’exigence américaine de « dénucléarisation complète et vérifiable ». Le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un a jusqu’à présent, rejeté cette demande.

Malgré de nombreuses allusions aux négociations en coulisses pour essayer de parvenir à une sorte de compromis, la rhétorique belliqueuse et catégorique de Trump au Parlement sud-coréen la semaine dernière a laissé peu de marge de manœuvre à son gouvernement. Il a juré qu’il « ne permettrait pas » au régime nord-coréen de posséder des missiles balistiques intercontinentaux (ICBM) qui pourraient atteindre les États-Unis. Sa position a été approuvée sans condition par le Japon, l’Australie et la Corée du Sud.

Que la Maison Blanche recule et accepte que la Corée du Nord possède des ICBM dotés d’armes nucléaires serait une débâcle pour Trump, dans des conditions où sa présidence est déjà assiégée par ses rivaux politiques à l’intérieur. Il y aurait des récriminations féroces au sein de son gouvernement, des services de renseignements, de l’armée et de la classe dirigeante américaine dans son ensemble.

La question posée par le WSWS dans sa perspective du 6 septembre plane toujours sur le monde : « Est-ce que Washington va entrer en guerre pour honorer sa rhétorique belliciste ? » Les menaces elles-mêmes – et la détermination à prouver qu’elles ne sont pas de simples bluffs – deviennent-elles une force motrice dans la marche vers une guerre nucléaire potentielle ? »

On pourrait poser la même question concernant les politiques commerciales du gouvernement. Dans un discours après l’autre, Trump a dénoncé l’Organisation mondiale du commerce et les arrangements multilatéraux de commerce et d’investissement que les États-Unis eux-mêmes ont établis après la Seconde Guerre mondiale pour réglementer les conflits entre les concurrents économiques. Il a catégoriquement juré de poursuivre un programme sans retenue de « l’Amérique d’abord » qui obligerait chaque pays à réduire considérablement ses excédents commerciaux avec les États-Unis.

Trump a assené cette demande non seulement à l’égard des « concurrents stratégiques » tels que la Chine. Il a également menacé le Japon et la Corée du Sud, parmi les alliés les plus proches des États-Unis dans la région, ainsi que les pays que les États-Unis cherchent à mettre sous leur égide stratégique, comme le Vietnam et l’Inde.

La réponse du régime chinois a été de poursuivre ses efforts pour développer de nouveaux accords commerciaux et d’investissement régionaux et internationaux qui excluent les États-Unis et réduisent sa dépendance au marché américain.

Lors du sommet de la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique (APEC) au Vietnam, les pays ont été courtisés par Pékin avec la perspective d’une participation lucrative à sa stratégie ambitieuse de construire une nouvelle « route de la soie » (One Belt, One Road – OBOR). L’objectif du régime chinois est de développer des réseaux de transport et d’énergie à travers la masse continentale eurasienne et de créer des liens étroits entre les principaux centres de production mondiaux et les marchés d’Asie de l’Est et d’Europe occidentale.

Le Pakistan, les pays sous-développés d’Asie centrale, la Russie et les pays d’Europe de l’Est pourraient potentiellement bénéficier de projets terrestres pour plusieurs milliards de dollars. Les liens maritimes impliquent des projets d’investissements chinois à grande échelle dans les ports et les infrastructures en Asie du Sud, en Afrique de l’Est, au Moyen-Orient et en Méditerranée.

Au Sommet de l’Asie orientale (EAS) aux Philippines, la Chine, l’Inde, le Japon, la Corée du Sud, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et les 10 États membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) ont tenu une nouvelle série de négociations consacrées à la création du Partenariat économique régional global (RCEP) proposé par Pékin.

Alors que deux alliés des États-Unis, le Japon et l’Australie, ont réussi à faire reporter tout accord final jusqu’à l’année prochaine, l’élan vers sa concrétisation était évident. Le bloc, qui exclut les États-Unis, permettrait de tisser des liens plus étroits au sein d’un groupe de pays déjà largement intégré par les réseaux de production mondiaux. Ensemble, ils génèrent environ 40 % du produit intérieur brut mondial et représentent la moitié de sa population.

L’extension logique du RCEP – à travers le système OBOR – comprendrait l’incorporation de la Russie, de l’Asie centrale, de l’Asie du Sud, du Moyen-Orient et de l’Afrique.

L’autre option, avancée par le gouvernement Obama, était le Partenariat trans-Pacifique (PTP), dominé par les États-Unis, qui allait exclure la Chine jusqu’à ce qu’elle dérégule les secteurs protégés de son économie nationale. Cependant, Trump a répudié le PTP dès son premier jour en tant que président, pour des raisons protectionnistes selon lesquelles il donnait aux pays membres un plus grand accès aux marchés américains.

La classe dirigeante japonaise, qui est tout aussi opposée à un bloc axé sur la Chine que Washington, continue d’insister pour que le PTP soit fondé sans la participation des États-Unis. Même si le bloc est finalement concrétisé, il serait éclipsé par la taille, la portée et l’ambition du RCEP.

Tout au long de sa tournée en Asie, Trump a fait tourner la tête aux gens avec sa fanfaronnade que la hausse irrésistible du marché boursier américain aurait démontré la « force » de l’économie américaine. Aux États-Unis comme à l’étranger, tous les analystes économiques sérieux avertissent que Wall Street est un château de cartes spéculatif, soutenu par les injections continues de fonds de la Réserve fédérale et des niveaux à la hausse de dette à haut risque.

Après des décennies de déclin relatif par rapport à ses rivaux impérialistes en Europe et au Japon, ainsi que dans de nouveaux centres économiques tels que la Chine, l’impérialisme américain est dans un état de décrépitude. Alors qu’une infime couche d’oligarques milliardaires contrôle des quantités de richesses presque incompréhensibles, la vaste masse de travailleurs américains doit faire face à une baisse du niveau de vie, à la détérioration des infrastructures et à une répression policière de plus en plus brutale.

Trump personnifie la dégénérescence et le désespoir de la classe dirigeante américaine. Dans toute l’Asie, il ne pouvait pas faire plus que d’exiger que les pays achètent plus de produits américains, faute de quoi ils encourent des sanctions. À certains moments, le président américain est apparu comme un veilleur du complexe militaro-industriel américain, insistant sur le fait que les gouvernements achètent à des « milliards » de dollars plus d’avions, navire de guerre et missiles fabriqués aux États-Unis.

Dans la mesure où Trump a sérieusement proposé que les sociétés basées en Asie transfèrent leur production vers les États-Unis, c’était fondé sur l’hypothèse implicite que les salaires et les conditions de travail américains ont été si tirés vers le bas qu’ils sont devenus « compétitifs » avec ceux de pays autrefois qualifiés de « main-d’œuvre bon marché ».

Le seul succès de la tournée de Trump, si l’on peut le dire ainsi, est que le Japon, l’Australie et l’Inde, des pays dont les élites dirigeantes sont aussi touchées par la crise que leurs homologues américains, ont exprimé leur soutien à une alliance « Quadrilatérale » [article en anglais] pour faire face militairement à la Chine et chercher à briser son influence régionale et internationale croissante.

La tournée de Trump en Asie marque un nouveau nadir dans la position stratégique des États-Unis. Cependant, le grand danger auquel fait face la classe ouvrière internationale est que la classe dirigeante américaine possède toujours une vaste machine de guerre et a démontré, à maintes reprises, qu’elle était prête à utiliser cette arme pour conserver sa domination mondiale.

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