Macron remporte l'élection présidentielle
Par Alexandre Lantier
8 mai 2017
Emmanuel Macron, le banquier Rothschild et ex-ministre de l'Economie du gouvernement PS sortant, a été élu présisident de la République hier. Il a reçu 65 pour cent des voix contre Marine Le Pen, la candidate du Front national (FN).
Les deux candidats étaient profondément impopulaires. L'abstention au second tour a atteint 26 pour cent, le niveau le plus élevé depuis 1969. 12 pour cent des votants, soit 4,2 million de personnes, ont voté blanc ou nul pour exprimer leur hostilité aux deux candidats de la classe dirigeante française. 34 pour cent des électeurs ayant entre 18 et 24 ans, 32 pour cent des électeurs ayant entre 25 et 34 ans, 35 pour cent des chômeurs, et 32 pour cent des ouvriers se sont abstenus.
La vaste majorité des électeurs qui ont voté Macron l'ont fait non pas par adhésion à son projet d'austérité, de militarisme, et d'hystérie sécuritaire, mais pour faire barrage au FN. Selon un sondage Ipsos, 61 pour cent des Français ont si peu confiance en Macron qu'ils ne veulent pas lui accorder une majorité à l'Assemblée nationale aux législatives en juin.
Quant au FN, le fait que le nombre d'électeurs qui se sont abstenus ou voté blanc ou nul était supérieur au nombre d'électeurs de Le Pen souligne sa large impopularité.
Néanmoins, dans un discours sommaire et insipide, Macron a lancé un appel au FN et à ses électeurs, laissant de côté la vaste majorité des Français qui avaient voté Macron ou qui s'étaient abstenus. Il a adressé un « salut Républicain » à Le Pen et exprimé sa compréhension pour « la colère, l'anxiété, les doutes » qui ont amené des millions de gens à voter FN.
Macron, un partisan de l'état d'urgence imposé par le PS qui suspend les droits démocratiques fondamentaux, a promis d'intensifier les politiques sécuritaires. Afin de signaler qu'il intensifiera le quadrillage de la France par la police et l'armée lancé par le PS lors de l'imposition de l'état d'urgence en 2015, il a promis d'assurer « de manière implacable et résolue votre sécurité, et l'unité de la nation ».
Adoptant une tonalité militariste, il a promis de se concentrer sur la « lutte contre le terrorisme » et la défense de l'Union européenne, ainsi que « la moralisation de notre vie publique ».
Marine Le Pen s'est exprimée devant des responsables FN. « Les Français ont choisi un nouveau président de la République et ont voté pour la continuité », a-t-elle dit, en ajoutant qu'elle avait contacté Macron pour lui souhaiter « de réussir face aux énormes défis auxquels la France est confrontée ».
Elle a évoqué le soutien accordé par le PS et ses alliés politiques à Macron, afin de présenter son parti d'extrême-droite en seule force d'opposition au nouveau président. Elle a déclaré que le FN et ses alliés seraient « la première force d'opposition au projet du nouveau président. Les forces qui ont soutenu Macron se sont díscréditées elles-mêmes, ne peuvent prétendre représenter une alternance et même pas une opposition ».
Elle a promis de lancer une « profonde transformation » du FN afin de remodeler son image et de le transformer en parti plus large qui pourrait remporter une majorité de l'électorat et, à terme, prendre le pouvoir. Elle a remercié Nicolas Dupont-Aignan du parti Debout la France pour avoir rallié sa campagne et prédit que davantage de partis ou de forces de droite rallieraient le néo-fascisme dans la période à venir.
L'élection de Macron ne résout rien. Elle crée seulement les conditions pour des crises politiques plus larges et plus explosives dans les mois à venir. Il arrive au pouvoir dans le contexte d'un effondrement historique du duopole PS-gaulliste qui a gouverné la France depuis la grève générale de Mai-juin 1968.
Les candidats PS et LR, Benoît Hamon et François Fillon, ont été éliminés au premier tour de l'élection, discrédités par les décennies de politique d'austérité et de guerre menée par leurs partis. L'incitation des hystéries sécuritaires et islamophobes, d'abord sous le président de droite Nicolas Sarkozy et surtout sous l'état d'urgence de François Hollande et du PS, a accéléré l'intégration du FN dans la politique française.
Les invitations à répétition par Hollande de Marine Le Pen à l'Elysée pendant son mandat ont joué le même rôle que l'appel lancé par Macron au FN au nom de l'unité nationale hier soir : de montrer que le PS et Macron considèrent que le FN est un interlocuteur politique légitime.
Comme Hollande, Macron semble vouloir cultiver le FN en tant que base politique pour son projet profondément impopulaire. Il a promis d'utiliser la loi travail antidémocratique imposée par le PS afin de détruire par ordonnance les conventions collectives et les acquis sociaux, et rétablir le service militaire afin de préparer la France pour des guerres majeures.
La réaction de Macron à l'élection souligne la justesse de l'appel du Parti de l'égalité socialiste à un boycott actif du second tour. Le PES a refusé l'idée selon laquelle Macron serait un moindre mal qui défendrait les droits sociaux et démocratiques, ferait barrage au FN, et présenterait une alternative politique réelle. Le PES a expliqué que la question centrale était de préparer politiquement la classe ouvrière pour les luttes qui éclateront contre le nouveau président, que ce soit Le Pen ou Macron.
L'orientation de classe de cette perspective révolutionnaire était totalement différente de celle des ambitions parlementaires et du soutien à peine déguisé pour Macron de divers alliés du PS, dont la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon. S'il n'a pas décidé d'appeler ouvertement à un vote Macron, Mélenchon n'a pas caché ses sympathies pour lui, notamment en offrant de devenir son premier ministre – une position dans laquelle il devrait assumer la responsabilité pour la politique étrangère belliciste de Macron.
Mélenchon a fait appel aux électeurs pour envoyer de nombreux députés de la France insoumise à l'Assemblée lors des élections législatives le mois prochain, ce qui augmenterait ses chances de devenir le premier ministre de Macron.
Alors que Macron présentait un projet de droite avec le soutien de PS et de LR, le FN a pu remporter 11 millions de voix, un record, en se faisant passer démagogiquement pour l'alternative populiste à Macron. La marge de Macron est de 30 pour cent. Toutefois, Le Pen a reçu le double du nombre de voit que son père, Jean-Marie Le Pen, a reçu l'autre fois que le FN est arrivé au second tour des présidentielles, en 2002. A cette époque-là, le FN avait reçu 17,79 pour cent des voix contre le candidat de droite, Jacques Chirac.