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Québec : la loi 78 dénoncée dans la rue

Par nos reporters
4 juin 2012

L'adoption par le gouvernement Charest de la loi 78, qui interdit les manifestations spontanées et criminalise la résistance aux mesures d'austérité de la classe dirigeante, a provoqué un vaste mouvement d'opposition populaire à travers la province.

Une foule rassemblant jusqu’à quelques centaines de manifestants munis de leurs casseroles marche chaque soir dans les rues du Vieux-Longueuil.

Dans plusieurs villes du Québec, et particulièrement dans la métropole montréalaise, les gens sont descendus dans les rues par milliers, plusieurs soirs de suite, pour dénoncer cette loi antidémocratique en formant des marches improvisées et en tapant sur des casseroles.

Ce mouvement spontané d'opposition a gagné plusieurs quartiers ouvriers de Montréal, notamment Villeray, Verdun, Saint-Henri, Rosemont, Notre-Dame-de-Grâce et Outremont.

Il s'est aussi fait sentir dans les banlieues, comme sur la Rive Sud à Longueuil, où le World Socialist Web Site a rencontré plusieurs participants et recueilli les propos suivants.

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Alain Saint-Amant, écrivain et père de famille, est venu avec sa femme et ses deux enfants. Il a accepté de répondre à nos questions.

WSWS : Que pensez-vous de la grève étudiante et de la loi 78 ?

ASA : Ça démontre à quel point le gouvernement est au service des grandes corporations et de Wall Street. Tout le monde est impliqué, ça a parti d’une cause étudiante et c’est devenu une cause sociale, nos droits fondamentaux sont attaqués et les gens résistent tous les jours partout au Québec, et ça c’est une bonne nouvelle.

WSWS : Voyez-vous le Parti québécois comme une alternative aux libéraux?

ASA : Non, certainement pas le PQ, il ne servirait qu’à débarquer Charest et à rétablir la paix sociale, à ramener le débat vers le socialisme. Mais c’est un parti bourgeois qui travaille pour l’argent au même titre que les libéraux. De là, la nécessité d’avoir des partis de gauche, qui militent, qui n'ont pas peur des mots. Il faut un scrutin proportionnel et avoir la possibilité d’envoyer ses candidats à l’assemblée nationale pour nous représenter.

WSWS : Pourquoi Charest souhaite tant briser le mouvement étudiant?

ASA : C’est un signe de dissidence évidente aux nouvelles politiques. Ils veulent passer le message.

WSWS : Pourquoi les étudiants ont-ils été isolés dans leur résistance?

ASA : Si les syndicats avaient vraiment vécu à la hauteur de ce qu’on attend d’eux, ils auraient sauté dans la lutte beaucoup plus conjointement. Et ce ne serait pas 200 000 [manifestants le 22 mars dernier] , ce serait 2 millions et on aurait le pouvoir pour négocier.

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Jean-François est chômeur. Il a accepté de répondre à nos questions.

WSWS: Que pensez-vous du Parti québécois ?

JF : La gauche s’est fait endormir au gaz par le PQ qui avait distribué assez à tout le monde pour s’endormir sur leurs deux oreilles. Ça fait 9 ans qu’on se fait diriger par un copier-coller des chambres de commerce. On doit élire un autre gouvernement.

WSWS : Voyez-vous une alternative ?

JF : Ce serait bien que Québec Solidaire rentre, mais ils se font marginaliser et se marginalisent eux-mêmes… Si QS n’est pas assez à gauche, alors aucun parti viable ne pourrait l’être assez.

WSWS : Pourquoi le gouvernement tient à briser le mouvement étudiant?

JF : Un électorat de droite s’attend à ce que leur gouvernement soit ferme face à l’opposition.

WSWS : Y a-t-il un lien avec ce qui se passe internationalement?

JF : L’humanité est dirigée par une oligarchie de milliardaires. Au Canada, Desmarais, Péladeau sont les représentants de cette oligarchie. Ils ont tellement gobé toutes les ressources de la terre qu’à un moment donné, c’est normal que les gens se réveillent.

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Ulises, est étudiant au Cégep Rosemont en Art et Lettres. Il nous a livré les commentaires suivants :

L’éducation devrait être gratuite. La hausse [des frais de scolarité] nuira à la société, à la population en général. Certains ne pourront pas étudier, et même ceux qui réussissent, rien ne leur garantit qu’ils se trouveront un emploi dans leur domaine et ils auront une dette énorme.

La Loi 78 n’a pas sa place dans un pays démocratique, ça va à l’encontre des droits de l’homme, j’espère qu’elle va disparaître le plus tôt possible.

Le gouvernement tente de nous désunir. Il voit une union, principalement étudiante mais maintenant des gens de la population qui nous appuient. Ils se rendent compte que notre gouvernement ne les représente pas.

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Mélanie, étudiante à l’UQAM et mère monoparentale, qui participe tous les soirs aux manifestations de casseroles à Longueuil.

La hausse est inacceptable, les fonds sont là, ils sont extrêmement mal gérés comme avec l’îlot voyageur. Il faut un moratoire pour savoir où l’argent s’en va. Ensuite si c’est nécessaire on paiera la hausse.

Quant à la loi 78, elle touche les droits fondamentaux de tous les travailleurs, tous les syndiqués.

Tout ce qui se passe avec la Grèce endettée, c’est du capitalisme à son paroxysme. Les banques, comme la BCE, prêtent de l’argent aux États pour faire plus d’argent en intérêts. Après quoi ils disent, ramène l’argent, sinon, je te mets dans le trou. Ça se fait par des mesures d’austérité, le chômage, les fermetures d’usines, etc. C’est encore le peuple qui paie pour la sauvagerie du capitalisme.