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L’annonce dans la presse de manœuvres effectuées par des bateaux de guerre russes dans la Manche souligne le danger croissant de guerre

Par Chris Marsden
1 décembre 2014

L’agence d’information russe RIA Novosti a rapporté vendredi 28 novembre que des navires de guerre russes avaient effectué des exercices dans la Manche. Son compte rendu affirme qu’une escadre de la Flotte russe du Nord était passée par le détroit du Pas-de-Calais après des exercices en Mer du Nord qui avaient démarré le 20 novembre.

Un destroyer, le bâtiment anti-sous-marin Severomorsk, ainsi qu’un navire de débarquement, un remorqueur de sauvetage et un navire-ravitailleur avaient mouillé en Baie de Seine, au large des côtes françaises. RIA citait une déclaration de la Flotte russe du Nord selon laquelle ses navires se trouvaient dans les eaux internationales de la Baie de Seine en attendant qu’une tempête passe et ajoutait, « Lors du mouillage, les équipages effectuent divers exercices sur la façon de faire face à… l’infiltration de forces sous-marines, et de formation aux techniques de survie en cas d’inondation ou d’incendie à bord. »

Des articles de presse ont dit qu’on ne pouvait joindre la marine russe pour des commentaires et le ministère de la Défense a refusé de commenter l’information.

La Grande-Bretagne et la France ont publié des communiqués niant l’affirmation de RIA selon laquelle ces navires effectuaient des manœuvres militaires. Le Royaume-Uni a dit que le navire de patrouille HMS Tyne avait observé les navires, que ceux-ci avaient respecté tous les ordres et étaient demeurés en dehors des eaux territoriales britanniques.

« Nous ne sommes pas sans savoir que quatre navires russes en provenance de la Mer du Nord ont franchi le détroit du Pas-de-Calais pour entrer dans la Manche, ce que tous les navires sont en droit de faire en vertu du droit international, » a dit le ministère de la Défense.

Le service d’information de la Marine française a confirmé l’emplacement des navires russes et a précisé, « Ils ne font pas d’exercices. Ils attendent juste dans une zone où ils peuvent se trouver plusieurs fois par an ».

Le lieutenant-colonel Jay Janzen, porte-parole militaire de l’OTAN, a dit, « Nos informations indiquent que les navires transitent et ont été retardés par les conditions météorologiques. Ils n’effectuent pas d’exercices dans la Manche comme certains médias russes voudraient nous le faire croire. »

Nonobstant ces déclarations, l’article de RIA Novosti suggère qu’au moins certains éléments dans l’Etat russe cherchaient à en faire un geste politique. De plus, la rapide diffusion de l’article à tous les médias souligne l’escalade des tensions entre la Russie et les pouvoirs de l’OTAN. La principale source de conflit est l’Ukraine où s’applique la politique d’expansion de l’OTAN vers les frontières russes qui va de pair avec des sanctions visant à paralyser l’économie russe.

Ce n’est pas là la première étincelle potentielle d’une action militaire entre la Russie et le Royaume-Uni et qui serait le résultat de l’attitude agressive des Etats-Unis et de leurs alliés. En mai, un porte-avions russe et son groupe aéronaval navigant vers la Manche furent placés sous surveillance par le croiseur HMS Drago et suivis sur le chemin du retour vers la Russie.

Le croiseur lourd porte-avions Amiral Kouznetsov, le Pierre le Grand, croiseur à propulsion nucléaire de classe Kirov et plusieurs autres navires les accompagnant rentraient après une mission de cinq mois en Méditerranée durant laquelle les avions de chasse Soukhoï Su-33 et les hélicoptères Kamov Ka-27 se trouvant à bord du Kouznetsov auraient effectué au moins 350 sorties d’entraînement.

Le stationnement du groupe aéronaval russe dans la Baie de Seine au large des côtes françaises survient quelques jours à peine après que le président François Hollande, sous les pressions répétées de Washington, eut renié un contrat d’un montant de 1,2 milliard d’euros pour la livraison de deux porte-hélicoptères à la marine russe. Un équipage russe se trouvait déjà à bord du premier des deux bâtiments de projection construits par la France et prêt à appareiller depuis St-Nazaire, le Vladivostok. Le second, baptisé du nom du port criméen de Sébastopol, annexé en mars par la Russie, est encore en cours de construction.

La semaine passée, l’OTAN a publié son dernier rapport sur l’intensification de l’activité militaire de la Russie, en particulier les confrontations en vol. Le rapport indique que les avions de l’Alliance atlantique ont effectué 400 sorties sur alerte cette année du fait d’une augmentation de 50 pour cent de l’activité militaire aérienne russe autour de l’Europe. L’OTAN a dit que la Russie utilisait son armée avec « beaucoup plus d’assurance ».

Les manoeuvres militaires les plus importantes sont actuellement menées par l’OTAN en Pologne dans le cadre du Plan de réactivité adopté lors de son récent sommet au Pays de Galles. Elles impliquent « le premier bataillon blindé » de l’armée britannique comprenant 1.350 soldats britanniques et 500 véhicules blindés. En décembre, l’OTAN discutera de la formation d’une nouvelle force de réaction rapide de l’OTAN pour l’Europe de l’Est sous direction allemande et prête à être déployée dès 2015.

Quatre jours seulement avant l’incident survenu dans la Manche, le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, avait réagi à la signature d’un traité entre la région géorgienne d’Abkhazie et la Russie en promettant de maintenir la « souveraineté et l’intégrité territoriale de la Géorgie à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues. »

Le 20 novembre, au début d’une visite en Estonie, en Lettonie et en Lituanie, Stoltenberg avait dit, « la responsabilité première de l’OTAN est de protéger et de défendre ses alliés. Et l’OTAN est là pour protéger et défendre l’Estonie. »

Il a décrit le nouveau Plan de réactivité de l’OTAN comme « le plus important renforcement de notre défense collective depuis la fin de la Guerre froide. » La présence en Pologne d’avions de chasse et de troupes de l’OTAN provenant de nombreux pays témoignait de « la détermination de tous les alliés de se tenir aux côtés des pays baltes. »

Stoltenberg avait poursuivi en remarquant que « notre mission de police du ciel dans les Etats baltes a procédé à plus d’une centaine d’interceptions cette année – trois fois plus que l’an dernier… L’OTAN reste donc vigilante. Nous sommes là. Et nous sommes prêts à défendre tous les alliés contre toute menace. »

Le 24 novembre, le lieutenant général Ben Hodges, commandant général de l’armée américaine en Europe, a dit à l’agence Baltic News Service durant son voyage en Lituanie que les centaines de soldats se trouvant actuellement en Estonie, en Lettonie, en Lituanie et en Pologne (tous des Etats membres de l’OTAN) y resteraient l’année prochaine aussi. Les forces américaines « resteraient ici aussi longtemps qu’il sera nécessaire pour rassurer tous nos alliés et dissuader l’agression russe, » a-t-il dit.

Deux jours plus tard, le général américain de l’armée de l’air, Philip Breedlove, le commandant suprême des forces alliées en Europe, a promis durant une visite à Kiev, « Nous allons aider l’armée ukrainienne à accroître ses capacités et ses moyens à travers une interaction avec le commandement américain et européen » et « à améliorer encore plus son interopérabilité avec nos forces. »

S’inspirant de Washington, le président ukrainien Petro Porochenko a exhorté jeudi le parlement ukrainien à abroger une loi de 2010 codifiant le statut non-aligné du pays afin de poursuivre une politique d’adhésion à l’OTAN. « Il est clair, aujourd’hui que le statut non-aligné de l’Ukraine, proclamé en 2010, ne pouvait pas garantir notre sécurité et notre intégrité territoriale, » a-t-il dit. « C’est pourquoi nous avons décidé de revenir au cours d’une intégration à l’OTAN. »

Porochenko a parlé d’un « vaste plan pour les six prochaines années, pour que le pays satisfasse aux critères d’adhésion à l’UE et à l’OTAN. »

Stoltenberg a salué cette annonce en disant, « la porte est toujours ouverte » à l’adhésion de l’Ukraine. Auparavant, le ministre tchèque des Affaires étrangères, Lubomir Zaoralek et le ministre lituanien des Affaires étrangères, Linas Linkevicius avaient déclaré conjointement qu’il ne serait pas permis à la Russie de dicter que l’Ukraine reste en dehors de l’OTAN.

Outre l’Ukraine, la Finlande, qui partage une frontière longue de 1300 kilomètres avec la Russie, est en train de discuter d’une éventuelle adhésion à l’OTAN.

La Russie a à maintes reprises dénoncé l’expansion de l’OTAN. Mercredi dernier, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov a dit, « Nous pensons, et nous avons discuté de cette question depuis le tout début de la période historique actuelle, que l’expansion irréfléchie et effrénée de l’OTAN est une erreur qui sape la sécurité en Europe. »

(Article original paru le 29 novembre 2014)