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Fort soutien des travailleurs canadiens de Fiat Chrysler pour une lutte internationale

Par Jerry White
27 août 2015

Les travailleurs de l'usine Fiat Chrysler de Brampton, en Ontario, ont réservé un accueil chaleureux samedi aux militants du World Socialist Web Site qui distribuaient l'Autoworker Newsletter (un bulletin des travailleurs de l'automobile en langue anglaise). Une équipe composée de militants américains et canadiens s'est rendue à l'usine le lendemain de la distribution du bulletin aux travailleurs de l'usine de General Motors d'Oshawa qui est à proximité.

Distribution de l'Autoworker Newsletter du WSWS à l'usine de Brampton

Les deux agglomérations d'Oshawa et de Brampton font partie de la région du Grand Toronto qui, avec plus de six millions de personnes, est la région la plus peuplée du Canada, de même que l'une des plus importantes zones métropolitaines d'Amérique du Nord.

L'usine Fiat Chrysler, qui a été construite en 1986 et qui était au début propriété d'American Motors Corporation (AMC), emploie 3418 travailleurs répartis sur deux quarts de travail. L'année dernière, ils ont produit 222.829 véhicules de modèles Dodge Charger, Dodge Challenger et Chrysler 300.

Il n'y a cependant aucun plan pour l'avenir de l'usine. Plus tôt cette année, le patron de Fiat Chrysler (FCA), Sergio Marchionne, s'est plaint en disant que le Canada «n'est pas ce que je pourrais appeler le pays le moins cher où produire». Comme GM et Ford, FCA utilise les menaces de nouveaux licenciements et de fermetures d'usines pour arracher des abattements fiscaux supplémentaires aux gouvernements du Canada et de l'Ontario, ainsi que plus de concessions salariales et d’avantages aux membres d'Unifor, le nouveau nom de l'ancien syndicat des Travailleurs canadiens de l'automobile (TCA).

En 1985, le syndicat des TCA s'est séparé de l’UAW, affirmant qu'il y avait une voie canadienne pour défendre les travailleurs de l'automobile contre les constructeurs automobiles mondiaux. Quels que soient les avantages en coûts que les TCA ont pensé pouvoir offrir aux entreprises grâce à un taux de change favorable et des soins de santé subventionnés, ceux-ci ont depuis longtemps été minés par les dizaines de milliards de dollars en concessions négociés par l’UAW aux États-Unis et les coûts de main-d'œuvre encore plus bas au Mexique. Depuis l'an 2000, environ 55.000 emplois dans les domaines de la construction automobile et de la production de pièces automobiles ont été éliminés au Canada et cinq usines d'assemblage ont été fermées.

Les travailleurs de l'équipe de jour ont avidement pris des copies de l'Autoworker Newsletter à leur sortie samedi et beaucoup se sont arrêtés pour discuter de la lutte des 140.000 travailleurs de GM, Ford et FCA aux États-Unis qui tentent d'obtenir une convention. Plusieurs ont exprimé un vif intérêt à l'idée d'unir les travailleurs américains, canadiens et mexicains. Ils ont également répondu positivement aux critiques des militants contre les approches nationalistes de l'UAW et d'Unifor qui permettent aux entreprises de monter les travailleurs les uns contre les autres dans leurs surenchères.

Des travailleurs de FCS quittant leur quart de travail

Paul, un travailleur temporaire à temps partiel depuis quatre ans à l'usine s'est entretenu avec le WSWS : «Je crois qu'ils essaient de se battre pour la sécurité d'emploi et de maintenir ce que nous avons ici, mais le problème est que l'entreprise veut sabrer dans les salaires encore plus, et tout ce que cela a donné, c'est de rendre les emplois beaucoup plus difficiles, en particulier dans l'assemblage. Le travail est beaucoup plus rapide et la production a augmenté – ils assemblent environ 450 voitures en un quart de travail. Le travail a changé depuis mes débuts. Il y a eu beaucoup de compressions et ainsi de suite. Ils ont essayé de faire des économies.»

Il a ajouté : «Ils utilisent le WCM (la fabrication de classe mondiale) comme tactique pour essayer d'augmenter l'efficacité. Mais en augmentant l'efficacité, cela rend les emplois difficiles parce qu'on ajoute plus et beaucoup de travailleurs ne peuvent pas suivre. Et la main-d'œuvre vieillit aussi. Il n'y a pas eu de recrutement majeur dans cette usine depuis 2005 et tout ce qu'ils ont embauché, ce sont des étudiants pour combler l'écart. Nous ne sommes plus payés le même salaire comme avant non plus.

«Il y a des années avant la faillite de Chrysler, tous les salaires étaient les mêmes et nous étions payés à temps et demi indépendamment du nombre d'heures qu'on avait travaillé avant si on devait travailler le samedi. Maintenant, il faut avoir accumulé 40 heures de travail dans la semaine pour pouvoir obtenir le taux et demi le samedi. Avant, c'était pareil comme pour les travailleurs à temps plein. Ils ont également réduit les avantages pour les travailleurs à temps plein, tout cela pour les profits», conclut Paul.

Un travailleur âgé a déclaré, «Si nous avons une augmentation et obtenons plus de 35 $ l'heure, notre salaire sera dans la gamme des monteurs-assembleurs et nos pensions augmenteront de 300 $ par mois. Ils ne veulent évidemment pas que cela se produise. C'est pourquoi ils veulent nous donner un bonus plutôt que d'augmenter nos salaires.»

Un autre travailleur comptant 27 années d'ancienneté a dit qu'il n'en pouvait plus d'attendre pour partir, et qu'avec les trois ans qui lui restaient, il comptait les jours. Il n'y a pas dix ans de cela, a-t-il dit, l'atelier de finition comptait 27 travailleurs. Il n'y en a plus maintenant que 14 qui se retrouvent avec encore plus de travail à faire.

Plusieurs travailleurs de deuxième catégorie se sont arrêtés pour parler aux militants. Ils partageaient entièrement la critique contre Unifor et étaient très intéressés par ce que l'UAW allait négocier comme convention dans les prochains mois aux États-Unis. Ils étaient très préoccupés par ce que des concessions supplémentaires de l'UAW signifieraient pour leurs conditions de travail, qu'ils décrivent déjà comme terribles. Des travailleurs ont demandé à un militant de leur donner plus de tracts pour les distribuer à leurs collègues de travail.

Un agent de sécurité a été envoyé pour menacer les militants d'arrestation s'ils ne quittaient pas les terrains de l'entreprise. Après que les militants se sont rendus à un arrêt de bus où les travailleurs attendaient – beaucoup de travailleurs de deuxième catégorie ont des salaires si bas qu'ils ne peuvent s'acheter de voiture – l'agent de sécurité est revenu à la charge pour leur dire que les tracts ne pouvaient pas plus être distribués là.

C'est à ce moment qu'un jeune travailleur est venu vers un militant en disant, «Donnez-m’en une pile, moi je vais les distribuer!» Un jeune employé dans l'un des magasins de détail près de l'usine a parlé avec le WSWS sur ce que cela signifierait pour les 524000 résidents de Brampton si jamais l'usine fermait. «Une grande partie des résidents du secteur sont des travailleurs de Chrysler, a-t-il dit. Ce sont eux qui soutiennent les commerces. Quand ils quittent leur quart de travail, ils s'arrêtent et viennent acheter des articles ici. Un des propriétaires dit qu'il fait pour 4 000 $ par jour seulement en cigarettes.

«Vous pouvez voir ce qui se passe quand ils ferment les usines. Detroit est mort. Il ne reste plus que 20 pour cent de la ville à Detroit. Ces gars-là restent en affaires en saignant les travailleurs qui ont bâti les entreprises.»

Il a également déclaré que les syndicats sont loin d'unir les travailleurs, mais plutôt qu'«ils les divisent. Ils s'en moquent. Tout ce qui compte, c'est l'argent. Là où c'est le moins cher, c'est là où ils vont mettre l'usine. Donnez-leur dix ans et tout sera automatisé. Il n'y aura plus que quelques centaines de gars là-dedans.»

Commentant ce que vit la jeune génération, il a dit : «Ça va être plus difficile pour nous, ça c'est sûr.»

(Article paru en anglais le 24 août 2015)