La réaction du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) au premier tour des
élections régionales le 14 mars souligne son soutien traitre des partis
bourgeois de « gauche » menés par le Parti socialiste (PS), d’opposition.
Malgré le bilan du PS et de sa défense publique des coupes sociales durant
la campagne électorale, le NPA appelle les électeurs à soutenir le PS sous
le prétexte perfide d’une solidarité politique contre la droite.
Lors du deuxième tour, les électeurs élisent les conseils régionaux qui
administrent les 22 régions de France. Depuis le premier tour, le PS a formé
une alliance électorale avec Europe Ecologie et le Front de Gauche – une
coalition du Parti communiste français stalinien (PCF) et du Parti de Gauche
de l’ancien ministre PS Jean-Luc Mélenchon – dans toutes les régions, à
l’exception de la Bretagne, de la Picardie et du Limousin. Cette alliance
est largement considérée comme une préparation pour les élections
présidentielles de 2012.
S’exprimant à la veille du premier tour, le porte-parole du NPA, Olivier
Besancenot, a appelé les électeurs à « confirmer et [à] amplifier les
résultats du premier tour en infligeant la défaite la plus importante aux
listes soutenues par [le président Nicolas] Sarkozy et l’UMP [l’Union pour
un mouvement populaire] ».
Besancenot a dit qu’il soutenait le PS bien que ce dernier ne s’opposât
pas à la politique d’austérité de Sarkozy. « Sanctionner la droite est une
nécessité absolue, même si nous pensons que les futures majorités de gauche
ne seront pas plus un rempart contre la politique de Sarkozy qu’elles ne
l’étaient ces dernières années. »
Le score du NPA s’est effondré à l’échelle nationale – chutant de 6,1
pour cent lors des élections européennes de 2009 à 2,4 pour cent au premier
tour de ces élections régionales. Il ne sera présent au second tour que dans
une seule région, le Limousin, grâce à son alliance avec le Front de Gauche.
Le NPA avait formé des alliances électorales avec le Front de Gauche en
Limousin, en Languedoc-Roussillon et dans les Pays de la Loire.
Le premier tour du scrutin, avec un taux d’abstention de 54 pour cent, a
souligné que les grandes masses de la population sont aliénées par
l’establishment politique officiel de la France. Dans les conditions où
des masses de gens ne voient pas d’autre alternative toutefois, le PS tire
profit de la colère populaire à l’encontre de la politique d’austérité de
Sarkozy et de l’UMP.
Dans ce contexte, le rôle du NPA est d’assurer qu’aucune alternative
politique n’émerge dans la classe ouvrière. Il promeut cyniquement
l’affirmationque le PS et ses partis satellites tels le PCF peuvent
être poussés à défendre les intérêts de la classe ouvrière – une position
dont la faillite et l’invraisemblance est en grande partie responsable du
déclin électoral du NPA.
Le PS est largement considéré être un parti pro patronat n’étant pas
fondamentalement différent de l’UMP qui représente les intérêts des banques.
Le gouvernement PS dirigé par le président François Mitterrand (1981-1995)
et le gouvernement du premier ministre Lionel Jospin (1997-2002) avait
appliqué des coupes sévères à l’encontre de la classe ouvrière en détruisant
des industries entières. Lors de la campagne actuelle, la première
secrétaire du PS, Martine Aubry a appelé à une réduction des retraites.
La défense du PS par le NPA est particulièrement significative, étant
donné que des gouvernements sociaux-démocrates partout en Europe –
l’Espagne, le Portugal et la Grèce – sont prêts à réduire radicalement le
niveau de vie pour payer les renflouements de banques et les effondrements
économiques qu’elles ont provoqués. Ces gouvernements ont fait pression pour
geler les salaires et imposer des réductions, un allongement de l’âge de
départ à la retraite, des augmentations d’impôts visant la population
laborieuse, des coupes sombres dans les dépenses publiques et autres mesures
réactionnaires.
En Grèce, les groupes de l’ex-gauche tels SYRIZA et ANTARSYA ont tous
soutenu le PASOK social-démocrate durant la campagne électorale de l’automne
dernier. Depuis que le PASOK est arrivé au pouvoir, ces partis lui ont
procuré une couverture en promouvant des manifestations organisées par les
syndicats sur la base d’une perspective en faillite, espérant pouvoir
convaincre Papandreou et les banques de changer de politique. Ils ont joué
un rôle crucial dans l’offensive de l’aristocratie financière à l’encontre
du niveau de vie de le classe ouvrière, en défendant et en fournissant une
justification aux partis bourgeois dirigeants.
Le Limousin – où le Front de Gauche avait décidé de se présenter sans le
PS – est la seule région où le NPA est présent au second tour. Le PS avait
fait une alliance électorale avec le MoDem conservateur (Mouvement
démocratique) de François Bayrou. L’échec du NPA à négocier une campagne
commune avec le PS est une autre occasion, pour le PS d’exercer des
pressions sur le NPA afin qu’il adopte une attitude plus accommodante, et
pour le NPA de déclarer sa loyauté à la « gauche » bourgeoise.
Un exemple de cette rhétorique a été la déclaration faite le 18 mars par
Alain Krivine, un dirigeant de longue date de la LCR (à présent NPA), lors
de sa réunion avec Jean-Luc Mélenchon en Limousin. S’adressant à une
alliance de staliniens de longue date et de permanents sociaux-démocrates,
Krivine a tenu à « remercier Nicolas Sarkozy » et « sa politique de guerre
civile » ainsi que « les dirigeants du PS qui préfèrent le MoDem au NPA, qui
ont permis de rassembler la véritable gauche » en Limousin.
Parlant du refus du PS d’accepter la liste d’alliance NPA-Front de Gauche
au second tour en Limousin, le député PS, Jean-Christophe Cambadélis a
déclaré : « C’est le problème du NPA. On ne peut pas à la fois attaquer le
Parti socialiste au niveau national et en même temps vouloir être sur une
liste [régionale] avec le Parti socialiste. »
Pour sa part, le président sortant et tête de liste PS en Limousin,
Jean-Paul Denanot a expliqué : « Je n’avais pas d’opposition à ce que le NPA
soit dans la majorité dans la mesure où il acceptait une solidarité de
gestion, […] mais je n’ai pas pu faire la clarté sur la position du NPA. »
Après l’échec des pourparlers avec le PS, le NPA en a rejeté la faute sur
le PS. Stéphane Lajaumont, le porte-parole du NPA en Limousin a dit qu’il
avait « fait tous les efforts mais [avait] finalement été conduit à se
maintenir, par la faute entière et exclusive de la fédération PS de
Haute-Vienne. »
Lors d’une interview accordée le 17 mars au journal stalinien
L’Humanité, Christian Audouin, tête de l’alliance NPA-Front de Gauche en
Limousin, a dit que le NPA avait décidé de participer au conseil régional
dominé par le PS : « C’est le prétexte grossier avancé par le PS pour
provoquer la rupture. Ici, le NPA s’est prononcé d’emblée pour une
participation à la gestion des affaires régionales. Tout au long des
négociations avec le PS, le NPA n’a cessé de rappeler qu’il était prêt à
‘mettre les mains dans le cambouis’. »