Un rapport émis par la Mission d’assistance des
Nations unies en Afghanistan (MANUA) fait la lumière sur le nombre croissant
d’hommes, de femmes et d’enfants afghans innocents qui sont tués
afin que les Etats-Unis et leurs alliés consolident leur occupation
néocoloniale du pays.
Le rapport de la MANUA compare le nombre officiel de décès
de civils pour les six premiers mois de 2009 avec ceux des années précédentes.
Du 1er janvier au 30 juin, il a répertorié 1013 morts civiles, « par
rapport à 818 pour la même période en 2008 et 684 en 2007 ». Autrement
dit, avec l’intensification de la guerre par l’administration Obama
et l’envoi de milliers de soldats et d’avions supplémentaires en
Afghanistan, le nombre de civils tués a explosé de 24 pour cent.
Les activités militaires de l’insurrection menée par
les talibans, intitulées dans le rapport « éléments
anti-gouvernement » (EAG), et les opérations des soi-disant forces pro-gouvernement
(FPG, les troupes étrangères et les forces de sécurité du gouvernement afghan)
ont contribué aux morts de civils.
Les attentats à l’engin explosif et les attaques
kamikazes par les insurgés seraient la cause de 595 décès, ou 59 pour cent des
victimes. Dans de nombreux cas, des civiles furent tués lors d’attaques
contre des cibles militaires de l’occupant. Les forces américaines et de
l’OTAN mènent des convois à travers les zones résidentielles et ont
établi des bases dans les villes et villages afghans pour empêcher que ces
derniers ne tombent sous le contrôle direct des talibans.
Parmi les civils tués à cause de l’insurrection se
trouvent de nombreux officiels et employés pro-occupation du gouvernement qui
ont été assassinés.
Les forces d’occupation ont tué 310 des victimes
civiles répertoriées par la MANUA, ou 30,5 pour cent. Des groupes
« inconnus » ou non confirmés ont été tenus responsables des 108
autres décès, ou 10,5 pour cent.
La cause principale des morts infligées par les forces
américaines et alliées fut les frappes aériennes. La MANUA a répertorié 40
attaques aériennes qui, additionnées, ont entraîné la mort de 200 personnes.
Uniquement en juin, six frappes aériennes ont tué 51 personnes, indiquant une
possible augmentation du taux de mortalité malgré les proclamations des
généraux américains qu’une attention accrue est portée pour empêcher ce
que l’armée appelle encore des « dommages collatéraux ».
L’évaluation de la MANUA des conséquences des frappes
aériennes serait remise en question par de nombreuses personnes en Afghanistan.
Le rapport accepte, par exemple, le chiffre officiel de 63 civils morts durant
l’assaut aérien du 4 mai sur le village de Bala Baluk, dans la province
occidentale de Farah, qui a duré des heures. Les gens de la région continuent
d’insister pour dire que le nombre de personnes décédées était au moins
144. Elle accepte aussi que les centaines de présumés talibans tués dans les
zones reculées du pays par des frappes aériennes étaient en fait des
combattants.
Selon un décompte réalisé par Associated Press, les forces
américaines et de l’OTAN ont affirmé avoir tué plus de 2310 talibans
cette année. En 2008, le compte était de plus de 3800. Avec l’intensité
des combats qui s’accentuent, le nouveau commandant en Afghanistan, le
général Stanley McChrystal, a ordonné aux forces d’occupation en mi-juin
d’arrêter de donner des évaluations des pertes talibanes présumées.
La statistique des frappes aériennes ne tient pas compte
des centaines d’hommes, de femmes et d’enfants qui ont été tués
cette année par des missiles lancés à partir de drones américains Predator de
l’autre côté de la frontière sur les communautés tribales du Pakistan.
L’insurrection anti-occupation est appuyée par la population pachtoune de
la région. En guise de représailles, l’armée américaine mène une campagne
systématique de massacres et de terreur contre eux.
Le 23 juin, une seule attaque américaine lors d’une
cérémonie funéraire dans le Waziristan du Sud a tué 80 personnes. En seulement
2 jours en juillet, les frappes de Predator ont tué 80 personnes de plus.
D’autres décès civils qui peuvent ne pas avoir été
comptabilisés, ou avoir été faussement rapportés comme des morts de talibans,
sont ceux infligés lors de raids réguliers menés par des unités spéciales des
forces armées sur les maisons des chefs des insurgés suspectés, combattants ou
financiers.
Le rapport note : « L’implémentation
d’opérations de recherches et de saisies (incluant les raids de nuit) est
aussi une source d’inquiétude et il y a eu des rapports provenant
d’un certain nombre d’opérations conjointes des forces militaires
afghanes et internationales dans lesquelles l’utilisation excessive de la
force a apparemment eu comme résultat des morts civiles. » Les agences
comme MANUA ont rarement la capacité de vérifier de manière indépendante qui et
combien de personnes sont tuées lors de telles actions.
Tout compte fait, le rapport MANUA dresse une estimation
pessimiste de la situation à laquelle fait face l’occupation menée par
les Etats-Unis en Afghanistan. L’augmentation des troupes par Obama est
loin de contenir la résistance afghane contre la présence de troupes
étrangères. Plutôt, les talibans et d’autres insurgés gagnent de
l’appui et augmentent l’étendue du territoire dans lequel ils opèrent.
La MANUA a noté : « Après que le
conflit eut gagné en ampleur et se soit approfondi au cours de 2007, 2008 et
2009, près du tiers du pays est maintenait directement touché par
l’insurrection à différents degrés. Le conflit est particulièrement
prévalant dans le sud, le sud-est, l’est, le centre et l’ouest du
pays. Il s’étend aussi dans des régions qui ont été jusqu’à
maintenant plus tranquilles, comme le nord et le nord-est. »
Les forces d’occupution, en réponse,
« tentent d’éradiquer l’insurrection et répondent aux actes
des insurgés dans les régions civiles et ils effectuent plus d’opérations
dans des régions habitées par les civils. Ces facteurs ont résulté en une
augmentation de nombre des morts et des blessures au sein des civils et de la
destruction des infrastructures, y compris les maisons et les avoirs qui sont
essentiels à la survie et au maintien de la vie. »
Le résultat est un nombre plus élevé de
civils afghans qui perdent la vie, particulièrement parmi ceux qui subissent
les frappes aériennes menées contre les talibans. Le Los Angeles Times du
30 juillet a rapporté que McChrystal avait donné l’ordre que des drones
Predator qui ont été dans le passé utilisés pour pourchasser les dirigeants
d’al-Qaïda dans les régions montagneuses éloignées soient plutôt déployés
dans des opérations ayant lieu dans « des centres importants de l’insurrection »,
c’est-à-dire des régions où l’on trouve une grande concentration de
population civile.
McChrystal a aussi demandé qu’une
douzaine d’avions sans pilote soient amenés des Etats-Unis en
Afghanistan. Le commandement central a aussi ordonné le transfert de
l’Irak vers l’Afghanistan d’avions-espions U2, d’unités
de génie du combat, d’équipe de déminage des routes et
d’hélicoptères.
Ceci souligne encore une fois le caractère
frauduleux de la soi-disant guerre contre le terrorisme, a dit un haut
responsable gouvernemental au Los Angeles Times sous le couvert de
l’anonymat. « Nous concentrons peut-être une trop grande partie de
notre activité contre Bin Laden. Nous devrions probablement redéfinir nos
priorités. »
McChrsytal a lui-même déclaré dans une
entrevue qu’il a donné récemment : « Je ne crois pas que nous
nous concentrons suffisamment sur notre travail de contre-insurrection. Je ne
suis pas en position de critiquer le contre-terrorisme, mais, au point où se
trouve la guerre aujourd’hui en Afghanistan, il est de la plus haute
importance de concentrer nos forces à un travail de contre-insurrection
classique. »
Loin d’avoir le terrorisme comme
cible, cette guerre est menée contre le peuple de l’Afghanistan. La
conséquence de l’augmentation du nombre des morts parmi les civils et les
insurgés sera une hostilité plus importante contre les forces de
l’occupation et une plus grande sympathie pour la résistance armée.
Au même temps, la politique du renfort mène
à une augmentation des décès au sein des forces de l’OTAN et des forces
américaines. En juillet, les forces étrangères d’occupation en
Afghanistan ont subi leurs pires pertes depuis le début de la guerre il y a presque
huit ans, perdant 75 soldats. Considérons seulement les deux premiers jours
d’août où neuf soldats américains ou de l’OTAN ont été tués, un
taux qui est comparable aux jours les plus intenses de la guerre en Irak.
Le rapport de la MANUA a prédit
qu’une augmentation marquée de la violence aura lieu au cours des
prochaines semaines, alors que l’administration Obama et ses alliés
tenteront de contrôler l’issue de l’élection présidentielle dans le
pays, y compris dans les régions sous contrôle des talibans où le président
Hamid Karzaï est largement méprisé.