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WSWS : Nouvelles et analyses : Etats-Unis

Cherchant à éviter la banqueroute, GM supprime encore plus d’emplois

Par Jerry White
19 juillet 2008

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Dans un geste qui, dans ses mots, vise à « augmenter ses liquidités pour se prémunir contre un ralentissement économique américain prolongé », General Motors a annoncé mardi son intention de supprimer des emplois et réduire les salaires et avantages sociaux de sa main-d’oeuvre salariée. Il réduira aussi la production à ses usines de camions légers, tentera de liquider des actifs et suspendra les paiements de dividendes aux actionnaires pour la première fois depuis 1922.

Ces mesures, qui visent à économiser 15 milliards $, ont été annoncées quelques semaines seulement après que GM eut confirmé la fermeture de quatre usines aux Etats-Unis, au Canada et au Mexique, et eut mis à pied 8000 travailleurs. Ces efforts, semble-t-il, sont les derniers d’une tentative de plus en plus désespérée pour faire taire les rumeurs sur Wall Street selon lesquelles le plus grand constructeur automobile mondial serait à cours de liquidités et pourrait bientôt déclarer faillite.

Plus tôt ce mois-ci, l’analyste du secteur automobile chez Merrill Lynch, John Murphy, mentionnant que GM dépensait près de 1,5 milliard $ par mois en liquidités, a affirmé que la faillite n’était « pas impossible si le marché continue à se détériorer et que d’importants revenus différentiels ne sont pas accumulés ».

Mardi, lors d’une conférence téléphonique avec les investisseurs, le directeur général Richard Wagoner a tenté de rassurer Wall Street que ces actions, en plus des réserves financières existantes et des marges de crédit, fourniraient à GM « amplement de liquidités jusqu’à 2009 » même si les ventes de voitures aux Etats-Unis chutaient à 14 millions par année. La moyenne des ventes de véhicules au cours de la présente décennie est de 16,8 millions.

Wagoner a admis que les turbulences provoquées par les prix records du pétrole et le resserrement du crédit, et le déclin de près de 20 pour cent des ventes de véhicules GM le mois dernier avaient pris la haute direction par surprise. « Depuis le premier jour de l’année, notre progression a été menacée par des conditions économiques américaines de plus en plus difficiles. Nous avons de grandes difficultés à voir clair dans notre boule de cristal. »

Le gros des coupes annoncées mardi retombera sur les employés de la compagnie, dont le nombre a déjà été réduit de 44 000 à 32 000 depuis juin 2000. Vingt pour cent des ingénieurs, des concepteurs, des comptables, des administrateurs et d’autres cols blancs de la compagnie, soit environ 6400 employés, perdront leur emploi.

Les salariés qui restent verront leurs salaires gelés jusqu’en 2009. De plus, à partir du premier janvier 2009, GM ne fournira plus la couverture des soins de santé pour les cols blancs à la retraite de plus de 65 ans, abandonnant ainsi des milliers d’anciens travailleurs et leurs épouses qui n’auront pour seule couverture que celle du gouvernement, Medicare.

La compagnie a aussi annoncé qu’elle réduirait la production de ses pick-up et 4X4 de 300 000 d’ici 2009, doublant presque ses objectifs initiaux annoncés au début juin. En plus d’accélérer le rythme des fermetures d’usines et suppressions de quarts annoncés précédemment, les récentes coupes entraîneront les mises à pied de milliers d’autres ouvriers à des usines d’assemblage, d’emboutissage, de pièces et de transmissions.

Pendant les deux dernières années, GM a éliminé les emplois de 53 000 travailleurs syndiqués, réduisant la force de travail de ses cols bleus en dessous de 60 000. En 1979, à son sommet, il y avait plus de 600 000 membres des United Auto Workers employés chez GM.

GM a aussi annoncé qu’il va reporter jusqu’à 2010 tout paiement au fonds de santé nouvellement fondé, ou VEBA, qui sera contrôlé par les UAW. Faisant partie de l’accord pour soustraire GM de toutes obligations futures de fournir une couverture médicale à ses retraités, GM s’était engagé à payer 1,7 milliard de dollars au fonds lors des deux prochaines années.

Dans le but de vendre les concessions dans les salaires et les avantages sociaux, l’UAW a prétendu que prendre le contrôle du fonds de plusieurs milliards de dollars garantirait une couverture médicale à ses membres, même si un ou plusieurs fabricants d’automobiles venaient à faire faillite. Le paiement reporté (combiné à la chute de la valeur des actions de GM, qui constituaient la principale part de la valeur du fonds) menace maintenant de jeter tout le plan dans l’insolvabilité, laissant des dizaines de milliers d’anciens travailleurs et les personnes à leur charge avec peu ou pas de bénéfices.

En ligne avec ses politiques pro-patronales, l’UAW n’a fait aucune déclaration sur les actions de GM ou sur les propos de plus en plus fréquents selon lesquels les fabricants d’automobiles de Détroit pourraient rouvrir les conventions collectives et exiger encore plus de concessions sur les salaires et les avantages sociaux de la part des ouvriers de l’automobile.

Aucun des deux candidats présidentiels n’a offert une réponse sérieuse à la destruction en cours des emplois dans le secteur de l’automobile. Après avoir exprimé ses sympathies obligatoires pour ceux étant affectés, Barack Obama, le candidat présidentiel démocrate, a dit : « Lorsqu’un pilier de l’économie américaine est obligé de faire une décision pour se restructurer comme celle que General Motors annonce aujourd’hui, c’est un sérieux rappel des temps économiques difficiles auxquels nous faisons face aujourd’hui et nous avons besoin de changement et d’une nouvelle direction à Washington. »

Obama, que l’UAW soutient, a rencontré le président de GM, Rick Wagoner, et le PDG de Ford, Alan Mulally, et s’est engagé à être le meilleur « partenaire » et assistant de l’industrie de l’automobile dans ses efforts pour rationaliser et être compétitif face à ses rivaux européens et japonais. Ce point de vue pro-entreprise et nationaliste, qui est depuis longtemps propagé par l’UAW, n’a produit rien d’autre que des désastres pour les travailleurs de l’automobile.

Même si Wagoner a prédit d’autres pertes de profits dans le futur immédiat, il a montré clairement que la compagnie était prête à passer à des mesures drastiques pour retourner à la profitabilité, incluant la vente de biens fonciers, de filiales internationales et de marques de commerce américaines ainsi que d’une portion de ses parts de 49 pour cent dans le financement de GMAC.

GM fera aussi pression sur ses fournisseurs pour qu’ils réduisent leurs prix de manière substantielle, un geste qui aura un effet boule de neige sur des centaines de milliers de travailleurs dans l’industrie de l’acier et des pièces d’automobiles. Des demandes similaires de réduction de prix ont amené American Axle, Delphi, Dana et d’autres fournisseurs de GM à couper jusqu’à 50 pour cent dans les salaires des travailleurs.

Dans un geste bidon de « sacrifice égal », Wagoner — dont la compensation a augmenté de 64 pour cent l’année dernière pour atteindre 15,7 millions de dollars et qui était flanqué lors de la conférence de presse du chef des opérations Fritz Henderson (9,3 millions de dollars, en hausse de 5,1 millions par rapport à l’année dernière) et du vice-président Bob Lutz (9 millions de dollars) — a annoncé que la compagnie couperait les bonus de ses administrateurs.

La réponse de Wall Street à l’annonce de GM fut tiède, l’action de la compagnie gagnant 0,40 $ pour atteindre 9,85 $ mardi dernier. La valeur des actions de GM reste la plus faible depuis 50 ans, valant 43 $ il n’y a qu’un an. La capitalisation de GM a chuté de 5,31 milliards de dollars, moins d’un vingt-huitième de la capitalisation de Google.

L’effondrement possible de GM a une signification historique. Un temps le symbole de la suprématie industrielle des Etats-Unis, sa chute est une expression du déclin du déclin à long terme de la position du capitalisme américain sur le marché mondial.

En 1955, quatre automobiles sur cinq dans le monde étaient construites aux Etats-Unis, la moitié par GM. La principale rivale de GM, la compagnie Ford, avait la moitié de sa taille et, comme BBC News l’a souligné, le plus important constructeur automobile hors Amérique, VW, était à peine plus grand que la division allemande de GM, Opel. Toyota n’était pas dans la course à cette époque, ne fabriquant que 23 000 automobiles par année pour le marché du Japon, comparé à quatre millions pour GM aux Etats-Unis.

Dans les années 1950, la région de Détroit avait le salaire médian le plus élevé et le plus haut taux de propriétaires de toutes les villes américaines. Aujourd’hui, suite à des dizaines d’années de congédiements de masse et fermetures d’usines, Détroit est la plus pauvre des grandes villes américaines alors que l’on trouve dans la plupart de ses quartiers des maisons brûlées ou décrépites. Le taux de reprises de maison est parmi les plus élevés du pays.

Durant les années 1990, les trois grands constructeurs automobiles américains sont devenus dépendants de la vente très profitable des pick-up et des 4X4. Lorsque le prix du pétrole était à dix dollars le baril, les ventes de 4X4 sont passées d’un à quatre millions alors que 60 pour cent des ventes des Trois Grands (et presque tous leurs profits) étaient dus aux camions légers.

Dans un contexte où l’économie américaine abandonne rapidement le secteur manufacturier pour adopter les formes les plus parasitaires de la spéculation financière, les dirigeants de l’industrie automobile, poussés par Wall Street et leur propre intérêt, ont sacrifié tous les intérêts à long terme de leurs compagnies pour faire des profits plus grands et plus rapidement. Les travailleurs paient aujourd’hui pour leur négligence de leurs emplois et leur niveau de vie.

En plus de GM, Ford et Chrysler ont annoncé des réductions du nombre des camions produits dans leurs usines américaines. Ford élimine 15 pour cent de ses cols-blancs d’ici le 1er août. Depuis 2005, le nombre des travailleurs employés par Ford est passé de 135 700 à 88 600.

Les analystes de Wall Street suggèrent maintenant que Chrysler, qui a été acheté par les fonds d’investissement privés Cerberus Capital Management l’an dernier, est la plus susceptible de déclarer faillite. L’analyste de l’industrie automobile de chez JPMorgan, Himanshu Patel, a dit que la compagnie est en position beaucoup plus précaire que celle de GM parce qu’elle a peu d’actifs à vendre pour obtenir des liquidités et qu’elle dépend beaucoup plus de la vente de camions et du marché nord-américain.

Alors que déclarer faillite lui rendrait la tâche d’obtenir du financement plus ardue, cela aurait l’avantage, du point de vue de Wall Street, de permettre à la compagnie de déchirer ses contrats de travail et d’imposer d’importantes diminutions de salaire et concessions dans les conditions de travail.

(Article original anglais paru le 16 juillet 2008)


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