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La campagne
publicitaire de Bush déclenche des protestations de la
part des familles des victimes du 11 Septembre
Par Patrick Martin
8 mars 2004
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Le Président Bush a indubitablement passé bien
plus de temps à tourner, pour sa campagne, des publicités
exploitant l'attaque terroriste du 11 septembre qu'il n'en prendra
pour répondre aux questions posées par la commission
indépendante chargée d'enquêter sur cette
attaque. Sa dissimulation des faits liés aux événements
du 11 Septembre est une des principales raisons expliquant les
réactions outrées de la part de nombreuses familles
de victimes des attaques de New-York et de Washington à
la première campagne publicitaire de Bush.
Les premières publicités ont été
diffusées Jeudi, dans différents États considérés
comme devant être les plus disputés lors de l'élection
de Novembre. Trois des quatre spots montrent les ruines d'une
des tours jumelles du World Trade Center, deux montrent des pompiers
évacuant de "Ground Zero" des restes enveloppés
dans la bannière étoilée. Toutes ces publicités
cherchent à tirer parti de cette tragédie, en suggérant
que la réaction de Bush faisait la preuve de ses qualités
de chef.
Un groupe de familles de victimes du World Trade Center, rejoignant
des pompiers de la ville de New York, ont protesté quant
à l'utilisation d'images du 11/09, et ont appelé
les organisateurs de la campagne de Bush à arrêter
de diffuser ces publicités.
Une déclaration, affichée sur le site internet
de "September 11 Families for Peaceful Tomorrows" (familles
du 11 septembre voulant des lendemains de paix) donne la parole
à plusieurs membres de familles touchées et de
pompiers s'opposant à ces spots. Andrew Rice, dont le
frère est mort au World Trade Center, déclare :
"L'utilisation, dans une campagne politique, de ces images
d'une scène de meurtre et de destruction est, au mieux,
inappropriée, et les politiciens, de tous bords, devraient
savoir qu'il y a une opposition parmi les "familles du 11/09",
quelles que soient leurs convictions politiques, à ce
type d'exploitation choquante".
Colleen Kelly, dont le frère William Kelly Jr. est décédé
dans l'effondrement du World Trade Center, déclara : "J'ai
peur que ces publicités, et celles qui vont suivre, ne
fassent partie d'une horrible joute politicienne entre les candidats,
où chaque parti attaquera l'autre, comme s'ils étaient
en quelque sorte indifférents aux horreurs de cette journée".
Kelly s'est investie dans des activités anti-guerre, se
rendant en Irak au début de 2003 pour montrer son opposition
à l'invasion imminente par les États-Unis, et pour
affirmer que la guerre n'était pas une réaction
légitime aux attaques du 11 Septembre.
Tim Ryan, soldat du feu basé dans le quartier de Chelsea
prés de Manhattan, déclara : "En tant que
pompier qui a passé des mois à Ground Zero, c'est
profondément répugnant de voir la campagne de Bush
utiliser ces images afin d'exploiter la plus grande tragédie
américaine de notre temps."
Kelly Campbell, co-directrice de "September 11 Families
for Peaceful Tomorrows", dit que les opinions sont profondément
divergentes parmi les proches des victimes. "Il n'y a pas
de consensus sur cette question, mais la plupart des "familles
du 11/09" sont très sensibles au fait que quelqu'un
exploite les images de la mort de leurs proches à ses
propres fins", dit-elle, "Et il flagrant que c'est
ce à quoi on assiste ici ».
Plusieurs proches de victimes du 11 Septembre firent des commentaires
acerbes dans la presse au sujet de Bush. Kristen Breitweiser,
dont le mari Ronald est mort dans le World Trade Center, déclara
; "C'est répugnant qu'il [Bush] ait eu l'audace d'utiliser
le 11 Septembre dans une campagne politique". Lorie Van
Auken, 48 ans, du New Jersey, qui perdit son mari dans les attaques,
dit : "Tous ceux avec qui j'ai parlé sont outrés,
complètement outrés." Ron Willett, dont le
fils de 29 ans John Charles a été tué au
World Trade Center, déclara à Reuters qu'il était
tellement écoeuré que "je préfèrerais
voter pour Saddam Hussein plutôt que de voter pour Bush".
Des officiels, tant de la Maison Blanche que du comité
de campagne pour la réélection de Bush, prirent
la défense de ces spots, et déclarèrent
qu'aucun d'entre eux ne serait retirés des ondes, et ce
malgré la protestation des "familles du 11 Septembre".
Dimanche dernier, on a vu sur les plateaux des émissions
d'entretiens télévisés une flopée
de porte-parole républicains monter au créneau
pour justifier la campagne publicitaire.
Bush lui-même répondit à des questions sur
cette polémique, déclarant samedi à des
reporters qu'il ne retirerait pas ces spots. "Tout d'abord,
je continuerai à parler des effets du 11 Septembre sur
notre pays et sur ma présidence," dit-il. "La
manière dont mon administration a fait face à cette
journée, ainsi qu'à la guerre contre le terrorisme,
mérite d'être discutée," ajouta-t-il.
"Et j'attends avec impatience d'en discuter avec le peuple
américain".
Comme le savent plutôt bien les familles des victimes du
11 Septembre, l'administration Bush a, en fait, fait tout ce
qui était possible pour éviter d'avoir à
rendre des comptes sur ses actes durant la période qui
précéda les attaques contre le World Trade Center
et contre le Pentagone, tout comme sur le comportement de Bush
lui-même ce jour là.
Le parent d'une des victimes du World Trade Center mit le doigt
sur cette contradiction alors qu'il réagissait à
la déclaration télévisuelle de la porte-parole
de campagne de Bush, Karen Hughes, qui décrivait les publicités
sur le thème du 11/09 comme "de bon goût"
et ne relevant pas de l'exploitation.
"Mon fils a été assassiné le 11 Septembre",
déclara Bob McIlvaine, dont le fils Bobby travaillait
dans les Tours Jumelles. "Prétendre qu'utiliser des
séquences des décombres des tours afin de faire
avancer la carrière politique de quelqu'un est "de
bon goût", doit être entièrement rejeté,
et je le condamne. Au lieu de jouer sur les émotions des
gens avec des images de ce jour là, le Président
serait bien inspiré de plus coopérer avec la commission
indépendante qui enquête sur le 11/09, afin que
nous puissions apprendre la vérité sur ce qui est
arrivé ce jour là, et pourquoi c'est arrivé".
La Maison Blanche s'est opposée pendant des mois à
la mise en place d'une commission d'enquête indépendante
sur les attaques du 11 Septembre. Quand elle ne put plus longtemps
résister à la pression des familles, elle nomma
l'ancien Secrétaire d'Etat Henry Kissinger pour diriger
l'étude, mettant ainsi un spécialiste de la dissimulation
en charge de l'enquête. Kissinger, néanmoins, fut
contraint de démissionner à cause de ses étroits
liens d'affaire avec des clients saoudiens et d'autres pays du
Moyen-Orient. L'ancien gouverneur du New Jersey, Thomas Kean,
un Républicain, le remplaça.
Malgré les efforts de Kean et de son vice-président
Démocrate, l'ancien membre du Congrès, Lee Hamilton,
pour arranger la Maison Blanche, il y eut une série de
vifs conflits entre la commission et l'administration Bush, qui
refusa de remettre des documents ou de laisser s'exprimer des
témoignages.
La "National Commission on Terrorist Attacks Upon the United
States" (Commission nationale d'enquête sur les attaques
terroristes contre les Etats-Unis) était, à l'origine,
censée rendre ses conclusions dans un rapport public,
le 27 Mai de cette année, mais face à la tactique
de ralentissement de l'administration, elle demanda plus de temps.
Des dirigeants Républicains s'opposèrent à
cette demande, essayant de forcer la commission à abandonner
ses recherches sur les points les plus controversés et
de la forcer ainsi à rendre un rapport qui laverait de
tout soupçon le comportement de l'administration.
Après de longues disputes, au cours desquelles le président
de la Chambre des députés, J. Dennis Hastert, menaça
de bloquer toute extension du délai, la commission et
l'administration tombèrent finalement d'accord sur la
date du 26 Juillet.
Les considérations politiques impliquées dans cette
polémique sont mises en évidence par le fait que
le 26 Juillet est le premier jour de la Convention Nationale
du parti Démocrate. Les membres de l'équipe de
campagne de Bush sont très inquiets que le rapport de
la commission, qu'ils prévoient comme devant jeter une
dure lumière sur les agissements de l'administration Bush
avant et pendant le 11 Septembre, soit rendu public bien avant
la campagne électorale en automne. Comme alternative,
les sénateurs John McCain (Républicain) et Joseph
Liberman (Démocrate) proposèrent de repousser cette
date limite au début de l'année prochaine, bien
après les élections.
Plus important que la question de la date butoir, les discussions
furent vives pour savoir si Bush, Cheney et d'autres officiels
de haut rang devaient témoigner en personne devant la
commission, pour quelle durée, en public ou non. La conseillère
à la Sécurité Intérieure, Condoleeza
Rice, refusa de témoigner en public; Tandis que la Maison
Blanche proposa, pour Bush et Cheney, une séance de questions,
en privé et en comité restreint (avec seulement
deux membres de la commission autorisés à y prendre
part, Kean et Hamilton), entretien limité à une
heure chacun.
Les négociateurs de l'administration se sont comportés
envers la commission comme s'il s'agissait d'une cour indépendante
enquêtant sur des comportements criminels de la Maison
Blanche, insistant pour limiter autant que possible l'accès
au Président et au Vice-Président. Cela malgré
le fait que Bush ait choisi chacun des membres, qui sont équitablement
répartis entre Républicains et Démocrates,
avec des Démocrates choisis sans exception parmi les éléments
les plus conservateurs, ceux qui soutiennent sans aucune critique
la "guerre contre le terrorisme" et qui se sont prononcés
pour l'invasion de l'Irak.
Voir aussi :
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