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Le procès en destitution est terminé mais la conspiration se poursuit

Par le comité de rédaction
13 février 1999

Le vote d'acquittement du Président Bill Clinton au procès en destitution du Sénat a été suivi d'une série de déclarations d'auto-félicitations, d'hymnes au bipartisme, de félicitations aux sénateurs pour leur sagesse et de diverses autres variations sur le thème que tout cet épisode a une fois de plus prouvé combien « le système fonctionne ». Il est difficile de relier ces remarques pompeuses aux faits véritables. Une conspiration politique fomentée par des éléments d'extrême-droite et fascisants au sein et proches du parti républicain sont en fait venu à deux doigts de réussir un coup d'État politique.

Des personnalités de deux branches du gouvernement américain ­ le Congrès et le législatif ­ se sont profondément engagés dans cette chasse aux sorcières menée par le conseiller indépendant Kenneth Starr et la campagne de destitution qui s'en est ensuivie. Pratiquement aucune résistance contre cette conspiration ne s'est manifestée dans les rangs de la démocratie bourgeoisie américaine, notamment de la soi-disant « presse libre ».

Finalement, une cinquantaine de sénateurs du parti majoritaire ont voté pour l'article de destitution inventé de toutes pièces, alors que 45 ont votés contre. N'eut été la vaste opposition parmi les grandes masses du peuple américain, ce putsch quasi-constitutionnel aurait réussi. Dans ces circonstances politiques, l'opposition populaire a en effet empêché le Sénat de reconnaître Clinton coupable et de l'expulser, et ainsi de consommer son coup d'État.

Ces faits sont bien connus au sein de la classe politique, mais ne sont jamais abordés en public d'un commun accord. Les remarques du sénateur Charles Schumer lors des délibérations à huis clos dans les derniers jours du jugement au Sénat illustrent bien jusqu'à quel point cela est compris. Ainsi, selon les extraits publiés dans le New York Times, Schumer a en effet fait allusion à l'érosion des institutions démocratiques révélée par la crise du procès en destitution, admettant même : « Pour la première fois, j'ai des doutes quant à savoir si nos institutions gouvernementales peuvent résister aux courants rancuniers qui sévissent dans le climat politique actuel ».

Le représentant démocrate de l'État de New York a souligné en termes brusques les efforts du « petit groupe d'avocats et de fanatiques issu d'organisations telle le Rutherford Institute » (qui a financé la poursuite intentée par Paula Jones) pour fabriquer un scandale sexuel et ensuite l'utiliser afin de renverser l'administration Clinton. « Ce qui est profondément dérangeant, a-t-il déclaré, ce n'est pas tant que ce groupuscule détestant Clinton ait pu manigancé ce plan, mais bien qu'il ­ ou tout autre groupe aussi dogmatique et sournois ­ ait pratiquement pu réussir ». Schumer reconnaît également que ce complot aurait pu réussir sans la vaste désapprobation du public lorsqu'il déclare : « Le peuple américain nous a sauvé de nous-mêmes ».

De telles remarques rarissimes étaient évidemment réservées au sanctuaire clos de la chambre du Sénat une fois vidée du public et des journalistes. Aucun des nombreux sénateurs ayant participé à la ronde d'interviews télévisés suite au procès ­ Schumer y compris ­ n'a soufflé le moindre mot de cette conspiration droitiste sous-jacente au procès en destitution.

Le refus opiniâtre de la vaste majorité des Américains de succomber au barrage de médisances salaces, de semi-vérités et de mensonges professé par Starr et ses alliés républicains, a entraîné ces derniers dans des dénonciations virulentes du peuple. C'est ainsi que les droitistes, de Pat Robertson à Robert Bork, ont condamné le public en le traitant d'immoral et d'ignorant. Pour sa part, le président de la magistrature de la chambre des représentants, Henry Hyde, a dénoncé les « basses valeurs » de la populace. L'allusion qui découlent de tels propos cependant et qui, bien souvent, a clairement été mise en évidence par certains, est la suivante : le peuple ne mérite pas la démocratie et les droits démocratiques sont un boulet politique dont il serait préférable de se débarrasser.

Les méthodes d'intimidation et de coup monté employées par Starr sont représentatives du contenu foncièrement antidémocratique de l'attaque politique menée contre la Maison Blanche. Or, si de telles méthodes sont employées contre le Président des États-Unis, quel sort réservent ces gens pour les simples travailleurs ?

Pendant que les médias et les politiciens tentent de réassurer le public en affirmant que la conclusion du procès en destitution démontre bien que le système politique américain est sain, il n'en demeure pas moins que fait le plus significatif, c'est qu'on ait pu en arriver là. Une crise de cette envergure au sein même d'un système politique ne peut être que l'expression de profondes contradictions dans l'ensemble de la société. Les antagonismes sociaux qui ont provoqué cette crise politique ­ le niveau sans précédent d'inégalités sociales, l'assaut ininterrompu contre les emplois et les niveaux de vie, l'étalement de la pauvreté, de la faim, de la maladie et de l'itinérance, la déchéance de l'éducation ­ subsistent toujours et sont en progression.

Suite à la crise provoquée par le procès en destitution, ces conflits vont évoluer par eux-mêmes, de plus en plus ouvertement et directement. Ils seront en outre exacerbés en retour par une situation économique de plus en plus instable.

Tout cet épisode constitue donc un avertissement aux travailleurs américains et du monde entier : le gouvernement du pays capitaliste le plus puissant au monde s'est révélé divisé et à toutes fins pratiques non fonctionnel. Ce qui nous est présenté comme l'État démocratique le plus stable au monde s'est révélé en fait extrêmement vulnérable aux méthodes conspiratrices et du coup d'État.

Le parti majoritaire à l'origine de cette tentative de coup est dominé par des forces d'extrême-droite et néo-fascistes. Le Parti démocrate, et l'administration Clinton en premier, se sont montrés incapables de monter une défense sérieuse et réticents même à simplement exposer les forces conspiratrices qui les ont attaqué.

Un système politique aussi malade et corrompu ne peut et ne pourra se rétablir par lui-même. La principale leçon politique à tirer de la crise causée par le procès en destitution, c'est de constater l'extrême fragilité des droits démocratiques des travailleurs sous l'ordre social et politique actuel. La polarisation sociale actuelle, qui va en s'amplifiant, est l'une des caractéristiques essentielles du développement capitaliste de cette fin de siècle. Cette polarisation met en relief une fois de plus une leçon fondamentale qui s'est déjà manifestée sous des formes des plus tragiques au début de ce siècle. Le triomphe du fascisme dans les années 20 et 30 avait en effet déjà démontré l'incompatibilité fondamentale entre le capitalisme et les droits démocratiques. Les récents événements démontrent à leur tour que si les travailleurs tant aux États-Unis qu'ailleurs dans le monde ignorent cette leçon, ils courent ainsi un grand danger.

 

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